Déclaration de la FSU au CDEN du 19 mars
Nous, représentants de la FSU à ce CDEN, n’avons pas participé aux travaux du CTSD du 18 mars : en effet, ce 18 mars était un jour de grève à l’appel de la CGT, FO, FSU, et de Solidaires sur les questions d’emploi, de rémunération, de protection sociale, et de service public.
Les annonces par le gouvernement sur la recherche de 50 milliards à trouver d’ici 2017 concernent en premier lieu la dépense publique. Les fonctionnaires sont ainsi dans le collimateur et d’ores et déjà diverses hypothèses circulent : réduction du nombre de fonctionnaires et remise en cause des postes programmés dans l’Education, gel des promotions, maintien du gel du point d’indice… Or, quelle est la réalité ? Depuis 2000, la revalorisation du point d’indice a d’abord été inférieure à l’inflation pour aboutir depuis 2010 à un gel complet. Parallèlement, les cotisations retraite ont augmenté ce qui aboutit à une baisse de fait du pouvoir d’achat.
En parallèle, les conditions de travail des enseignants du second degré n’ont cessé de se dégrader. Et avec elle les conditions d’apprentissage des élèves. Et c’est bien de cela dont nous allons parler aujourd’hui en évoquant la préparation des conditions de rentrée 2014.
Nous avons été amenés depuis plusieurs années à critiquer la dotation départementale en votant contre ou en nous abstenant sur les projets soumis à notre analyse : par ces prises de position, soyons clairs, il n’a pas été question de mettre en cause fondamentalement le travail de répartition des services de l’inspection d’académie, mais bien d’affirmer que la répartition des moyens proposée ne pouvait être satisfaisante parce qu’elle se faisait dans le cadre d’une dotation jugée insuffisante.
Si notre organisation syndicale a pu accueillir positivement l’arrêt des suppressions de postes et la création d’emplois dans l’Education Nationale – et ce après des années de diminution des moyens humains – elle doit aujourd’hui constater que les moyens octroyés ne seront pas suffisants pour améliorer significativement les conditions de travail et d’enseignement à la rentrée 2014.
Les chiffres parlent malheureusement d’eux-mêmes…
En 2010, le H/E (nombre d’heure par élève) était de 1,332 en collège, 1,688 en LGT, 2,297 en LP, soit une moyenne départementale de 1,581. En 2014, ce H/E sera respectivement de 1,275, 1,583, 2, 321, soit une moyenne départementale de 1,509. Entre l’année dernière et la prochaine rentrée, le H/E de collège progressera légèrement du fait des priorités académiques, mais celui de lycée diminuera du fait notamment d’une réforme favorisant les classes à effectifs lourds (80% des classes de 2nde GT en France ont actuellement plus de 30 élèves – et 30% ont plus de 35 élèves – contre respectivement 72% et 22% en 2009). Pour revenir aux taux d’encadrement moyen de 2010, il faudrait ainsi 55 ETP supplémentaires par rapport à la dotation actuelle (25 sur les collèges et 21 sur les LGT).
Qui peut croire que cette diminution des taux d’encadrement ne se fait pas aux dépends des élèves ?
Des effectifs par division en hausse, c’est – quoi qu’on en dise… – un travail potentiellement moins serein – pour les élèves comme pour les enseignants ; ce sont des possibilités moindres de diversification des modalités pédagogiques (travail en groupe, travail individualisé, travail sur projet, utilisation des TICE, pratique de l’oral, etc…), diversification que l’on sait intéressante et efficace en terme d’appétence et d’apprentissage.
Ajoutons que, pour les enseignants, c’est tout simplement une augmentation importante de la charge de travail : pour un même nombre de classes (et donc d’heures de cours), c’est plus de copies à corriger, ce sont de nombreuses tâches annexes qui s’alourdissent, c’est un suivi individuel des élèves qui devient de plus en plus difficile. Cette augmentation du temps de travail hebdomadaire moyen d’un enseignant du second degré a d’ailleurs été chiffrée par la Direction de l’évaluation de la prospective et de la performance (DEPP), service du ministère, et ce temps de travail est passé depuis 2008 de 39 h 50 à 41 h 15.
S’il est important de mettre en relief ici cette dégradation des conditions de travail, c’est pour rappeler qu’au bout du compte, ce sont les élèves, et plus particulièrement les plus en difficulté, qui pâtissent de ces situations insatisfaisantes.
S’ajoute, dans cette préparation de rentrée 2014, une problématique particulière, celle des Langues Vivantes en collège : en effet, à l’occasion du CTA du 16 janvier Madame la Rectrice a annoncé la généralisation dans l’académie d’une expérimentation en collège, expérimentation qui n’a été ni discutée avec les organisations syndicales, ni évaluée quand elle a été mise en œuvre, par exemple dans le Lot. Il s’agit de mettre en place, dès la rentrée 2014, l’enseignement pour tous les collégiens d’une LV2 dès la 5ème à raison de 2 heures par semaine.
Le dispositif pourrait paraître de prime abord séduisant ; il pose toutefois plusieurs problèmes.
D’abord, et cela n’a rien d‘anodin, un problème de moyens : pour financer cette expérimentation, il a été décidé de ne plus financer les sections européennes et de supprimer les classes bi-langues, et ce au nom d’une équité au sein de l’académie… Un argument que l’on peut juger recevable, mais qui entre en contradiction avec le fait que pour mettre en place cette LV2 en 5ème, dans le cadre d’un budget contraint, la rectrice est amenée à ne plus respecter les grilles horaires fixées nationalement en 6ème en dérogeant à l’horaire obligatoire. Les élèves de l’académie n’auront plus que 3 heures de LV1 quand d’autres élèves en France en auront 4. Où donc est l’équité dans tout cela ?
Au delà de cette analyse, nous estimons que l’efficacité pédagogique de ce dispositif est contestable, dans la mesure où 2h de LV2 sont insuffisantes pour débuter l’apprentissage d’une langue, toutes les études montrant que temps et fréquence d’exposition sont des éléments clefs de l’apprentissage des langues, ainsi que des effectifs réduits pour un travail efficace, à l’oral notamment.
Il faut souligner, par ailleurs, cette expérimentation a des conséquences en terme de carte scolaire et d’organisation dans les établissements (compléments de services éventuels, mise en danger de postes d’anglais, répercutions sur les options – latin, occitan, etc…) et peut susciter de l’inquiétude quant à l’affectation d’enseignants sur les heures d’espagnol puisque cette année déjà le recrutement était difficile. Dès lors, il eût été judicieux, plutôt que de se livrer à cette expérimentation contestable et contestée, d’attendre les concertations prévues dans le cadre des travaux du Conseil Supérieur des Programmes dont la vocation est d’engager très vite une réflexion sur les contenus enseignés au collège.
Pour finir, puisque ce CDEN est l’occasion d’une nouvelle information sur les rythmes scolaires, la FSU rappelle qu’elle demande la suspension de cette réforme et l’ouverture de discussions pour une autre réforme : parce que, redisons-le, la réforme des rythmes scolaires, qui prétend s’attaquer à la fatigue des enfants, ne répond en rien à ce qui fatigue réellement les élèves, comme les classes surchargées ou le manque de remplaçants ; parce que les enseignants refusent la dégradation de leurs conditions de travail et de celles des élèves, dégradation dont les élèves les plus en difficulté seront les premières victimes ; parce qu’en l’absence de garanties de financement par les communes du temps périscolaire, cette réforme renforcera les inégalités territoriales et provoquera une rupture de l’égalité de l’offre éducative sur le territoire national.
On le voit donc la préparation de rentrée 2014 n’a rien de serein : les personnels entrevoient les difficultés qui vont persister voire dans un certain nombre de cas s’aggraver. Et ils ne l’acceptent pas. La FSU porte l’exigence de la réussite de tous et reste convaincue de ce qui est en fait une évidence : cette ambition passe par un budget ambitieux incompatible avec une politique d’austérité budgétaire. Comme elle le fait aujourd’hui par cette déclaration rappelant la réalité et les besoins du terrain, la FSU continuera de revendiquer auprès de tous, élus, parents d’élèves, enseignants, les conditions permettant la nécessaire réussite de tous.
Avec conviction, force et constance…
Source: fsu12