Le projet d’utilisation des 500 millions d’euros affectés dans la loi de finance en 2021 a été dévoilé vendredi par le ministère terminant une première phase de concertation sur la revalorisation des enseignantes et des enseignants. Des propositions pas à la hauteur et non sans contreparties.

Dans le cadre d’une réforme des retraites qui ferait perdre plus de 600 euros de pension mensuelle moyenne aux générations nées après 1975, les propositions du ministère pour 2021 se situent dans le cadre étriqué d’une somme globale de 500 millions pour plus de 900 000 personnels concernés… 4 scénarios ont été dévoilées et mettraient en place une « prime d’attractivité du métier » dégressive avec l’ancienneté dans la carrière. Son montant serait variable en fonction du nombre de personnels concernés, la volonté du ministère étant de valoriser en premier lieu les débuts de carrière. Le premier scénario ne toucherait que les 9 premières années de carrière (14 % des enseignants) ; le deuxième les 12 premières années (23 % des enseignants) ; le troisième les 18 premières années (44 % des enseignants) ; le quatrième toute la classe normale (76 % des enseignants). Dans ce dernier scénario par exemple, l’indemnité se monterait à un peu plus de 90 euros nets mensuels en début de grille à moins de 15 euros en fin de grille.

Cette revalorisation se ferait sous forme de primes indemnitaire pour toutes et tous et perdureraient au-delà de 2021. Par ailleurs le ministère s’est également engagé sur l’amélioration des conditions d’accès à la Hors-classe et à la classe exceptionnelle.
Enfin deux autres mesures seraient financées sur cette même enveloppe de 500 millions : des temps de formation continue rémunérés pendant les vacances ainsi que le développement des heures supplémentaires effectives (HSE) dans le second degré. Autant dire la mise en place d’un « travailler plus pour gagner plus », alors même que la revalorisation devrait entièrement porter sur la reconnaissance de la réalité du travail visible comme invisible qui n’est plus à démontrer dans la profession.

Une bien maigre revalorisation

Même si cette première concrétisation est à mettre complètement à l’actif des mobilisations enseignantes depuis le 5 décembre dernier, elle reste d’une part complètement corrélée à la question des retraites et surtout ne correspond pas à la hauteur du déclassement salarial que subissent les enseignantes et les enseignants français. Ainsi en ne s’engageant que sur une première enveloppe de 500 millions et sur une loi de programmation pluriannuelle sur 5 ans débordant la mandature actuelle et avec, a priori, 500 millions supplémentaires chaque année, le ministère n’affiche même plus l’objectif des 10 milliards qui avait pourtant été annoncé plusieurs fois face caméra. On est loin pour l’instant de la mise en œuvre d’une véritable loi de programmation pluriannuelle ambitieuse permettant de revaloriser très rapidement l’ensemble de la profession et d’améliorer fortement l’attractivité du métier.

Une revalo en forme de leurre pour modifier le métier ?

Ces annonces sur la revalorisation ont été précédées de trois ateliers de travail au ministère revisitant les missions des personnels enseignants avec l’idée d’évoluer vers une « meilleure gestion des ressources humaines ». S’il est vrai qu’en la matière la marge de progrès est conséquente pour ce ministère-employeur, ses objectifs sont en contradiction avec ce qui fait la culture du métier. « Individualisation des carrières », « développement des postes à profil », « introduction de la direction d’école dans la chaine hiérarchique », autant d’objectifs plus ou moins avoués qui viennent donner une couleur managériale bien éloignée des valeurs de l’école et surtout de ses besoins pour améliorer la réussite de tous les élèves. Développer les collectifs de travail ne peut consister à imposer des pratiques et des fonctionnements, comme peut le laisser à penser la recherche d’un « meilleur pilotage » cher à ce ministre…